Les projecteurs à sources multicolores

La possibilité de concevoir des projecteurs à sources multicolores (composées de LEDs de différentes couleurs) est l’innovation majeure occasionnée par la LED ; c’est aussi celle qui vient le plus perturber les références colorimétriques des utilisateurs. En raison de leurs petites tailles, plusieurs LED peuvent être assemblées à l’intérieur d’un même appareil d’éclairage tout en donnant l’impression qu’il s’agit d’une source unique. Ainsi, il est possible d’additionner trois, quatre, cinq, six, sept ou huit types de LED rayonnant chacune dans une plage chromatique (teinte) différente. Les teintes les plus répandues sont : Bleu Royal (ou Indigo), Bleu, Cyan, Vert, Menthe, Citron, Ambre, Rouge, Rouge profond. Ce principe permet d’obtenir une gamme de lumières « blanches » et « colorées » plus ou moins saturées, dont la richesse dépend de la qualité et du nombre de teintes qui entrent dans la composition chromatique. Par conséquent, il est possible de définir la teinte et la saturation de la couleur de la lumière en ajustant les proportions de chaque composante chromatique. (Voir aussi : L’addition) Les filtres qui ont accompagnés les évolutions de l’éclairage électrique depuis la fin du XIX^e siècle en deviennent obsolètes.

Exemple de projecteurs multicolores à découpe

Le « PAR à LED »

Si les projecteurs équipés de systèmes optiques (lentilles et réflecteurs) tel que les Découpes, les Fresnels, mais aussi les Rampes et les Cycliodes, ont été répliqués en de nouveaux modèles incluant des sources LED de façon relativement similaire, il n’en est pas de même pour le « PAR ». Du reste, cela n’a pas vraiment de sens de parler de « PAR à LED » puisque rappelons-le, « PAR » (Parabolized Aluminium Reflector) est le nom d’un système composé d’une lampe encapsulée entre son propre réflecteur et sa propre lentille. Le projecteur « PAR » n’est qu’une « boîte de conserve » vide (qui porte d’ailleurs le nom de « PAR Can » chez les anglosaxons) servant de réceptacle à la lampe « PAR » qui centralise et lui confère toutes ses caractéristiques optiques. Il existe différents modèles de lampes PAR64. Chaque modèle est qualifié d’après son angle d’ouverture, conformément à certaines classifications : CP60, CP61, CP62, et CP95 (code LIF : Lighting Industry Federation) ou VNSP, NSP, MFL, WFL et VWFL (code NEMA : National Electrical Manufacturers Association). Pour une même référence (ex : CP61), les angles de faisceaux diffèrent selon les fabricants.

Il existe bon nombre de projecteurs à source LED (généralement basés sur des sources multicolores de 3 à 7 couleurs, avec parfois un zoom motorisé, parfois un système de « lentilles » interchangeables) qui peuvent se substituer au « PAR » mais aucun ne peut revendiquer ce nom au sens strict du terme ; l’appellation « PAR à LED » est pourtant souvent utilisée dans la réalité. Actuellement, un système combiné « réflecteur/LED/lentille » sur le modèle de la lampe « PAR » n’existe pas et on peut émettre l’hypothèse qu’il n’existera jamais. L’industrie du spectacle ne représente qu’une toute petite part du volume de production des fabricants de lampes ou de LED, il n’est pas surprenant que le « PAR » qui a été développé pour d’autres industries (phares de voitures, de trains, d’avions…) avant d’être détourné vers la scène, ne soit pas l’objet d’une recherche de reproduction LED.

Le « BT »

La singularité des projecteurs « BT », dont la dénomination et les particularités se fondent sur la nature de leur alimentation électrique (la basse tension ; plus précisément la très basse tension : TBT), ne peut pas être reproduite par la LED. Ces projecteurs, au rang desquels il faut compter les BT 250, 500, 1000, et la légendaire rampe Svoboda, fonctionnent avec des lampes 24V. Le filament de ces lampes offre l’avantage d’être beaucoup plus petit et concentré que celui d’une lampe 230V et peut ainsi être placé précisément au point foyer d’un réflecteur parabolique pour permettre d’obtenir des faisceaux parallèles étroits et denses, ou un « mur de lumière » par l’addition de plusieurs rampes Svoboda. Comme pour le « PAR » ce sont ici aussi les caractéristiques de la lampe qui confèrent leur spécificité au projecteur. Pourtant, si cette spécificité propre au filament et à la tension du courant électrique n’est pas transposable à la LED, il existe néanmoins des projecteurs LED capables de composer des faisceaux intenses et serrés ou des « rideaux de lumière », pouvant s’y substituer (Clay Paky, Axcor Beam 300. Clay Paky SharBar, par exemple).

Le « PC » versus les projecteurs modulaires et polyvalents

L’utilisation du projecteur PC (plan convexe) à lentille claire, constitue une spécificité et une quasi-exclusivité française. Ce type de projecteur est absent de la plupart des autres pays du monde et la France va certainement elle aussi devoir apprendre à s’en passer. En raison de ses caractéristiques optiques, la lentille claire ne s’adapte pas aussi bien que la lentille martelée (« pebble ») sur un projecteur PC à source LED. Il est toutefois assez simple de s’abstenir d’utiliser des PCs à lentille claire : lorsqu’ils sont utilisés avec des diffuseurs, les PCs à lentille claire peuvent facilement être remplacés par des PCs à lentille martelée ou des projecteurs à lentille Fresnel. Lorsqu’ils sont utilisés sans diffuseur, ils peuvent facilement être remplacés par des découpes équipées d’un zoom ou d’une focale fixe ; il faut alors bien anticiper la taille d’ouverture du faisceau nécessaire à obtenir le résultat attendu, pour pouvoir choisir le bon système optique lors de la mise en œuvre.

La modularité et la polyvalence sont des caractéristiques qui s’observent de plus en plus parmi les nouveaux modèles de projecteurs. Certains fabricants (ETC, Chauvet, Prolights, …) proposent des corps de projecteurs sur lesquels peuvent se greffer différents systèmes optiques. Ces « boîtes à lumières » (ou « lanternes ») peuvent ainsi servir de base à l’assemblage d’une découpe avec zoom ou focale fixe, d’un projecteur Fresnel ou d’un projecteur Cycliode. Cela permet de pouvoir constituer un parc de projecteurs avec un nombre d’accessoires optiques plus important que le nombre de « lanternes », afin d’avoir la capacité de s’adapter à un maximum de situations tout en réduisant les coûts d’investissement. Afin de satisfaire les personnes pour lesquelles la manutention et le stockage des différents systèmes optiques apparaissent trop contraignants, il est récemment apparu des objectifs hybrides très polyvalents. Le fabricant Robe Lighting a développé pour le théâtre et les plateaux TV une Découpe à sources multicolores (T11) équipée d’un zoom à plage très étendue (5°/50°) dont la lentille claire peut très simplement être remplacée par une lentille martelée ou une lentille Fresnel, proposant ainsi un véritable projecteur « couteau suisse ». Pour parvenir à développer un tel système optique, ce fabricant a tiré profit de son expérience des projecteurs asservis. Une telle plage de zoom n’avait encore jamais été proposée sur une Découpe tandis qu’elle était déjà disponible sur de nombreux projecteurs asservis. Sur le même principe, la marque Elation propose une découpe (KL Profile FC) avec un zoom 7°/50°.

Les projecteurs asservis

Le secteur du théâtre considère encore parfois que les projecteurs asservis (ou motorisés) sont réservés aux salles de concerts, à l’événementiel, à la télévision ou plus généralement à tout ce qui revêt un caractère de « divertissement » et de « spectaculaire » desquels il cherche à se démarquer. Pourtant, même s’il est vrai que ces appareils d’éclairage motorisés ont réellement commencé à se développer au début des années 1980 pour répondre à la demande de ce type d’industrie, les premières traces d’automatisation et de commande à distance du faisceau lumineux d’un projecteur ont eu lieu dans un théâtre en 1906 (Edmund Sohlberg, Kansas City, Missouri). L’appareil était équipé d’un changeur de couleur électromécanique et d’un jeu de cordes et de poulies qui permettaient à un opérateur d’en modifier l’orientation et l’ouverture du zoom.

Plusieurs brevets de projecteurs automatisés furent déposés en Amérique du Nord dans les années 1920 et 1930. Les premières expérimentations d’envergure ont été menées par la Century Lighting (qui deviendra Strand Lighting) dès le début des années 1950 pour les besoins du cinéma (Cecil B. Demille) puis au début des années 1960 pour ceux du théâtre (Washington Square Theatre) et de la comédie musicale (Peter Pan). Au début des années 1970 en Europe, le théâtre de Bâle innove avec une installation unique de 200 projecteurs Niethammer motorisés (pan/tilt, couleur, zoom, intensité) et un système de contrôle numérique unique en son genre.

En 1981, le contexte technologique le permettant, la réalité économique des prestataires le nécessitant, et la quête du spectaculaire le motivant, la créativité et l’enthousiasme de quelques-uns a permis différentes innovations simultanées : le VL1, issu de la collaboration du groupe Genesis avec le prestataire Showco (qui donnera naissance à la société Vari-Lite), le PanCan (à l’initiative d’un ancien éclairagiste de Pink Floyd) et le Telescan (de la société française Caméléon). Les années 1980 ont vu rapidement apparaître de nouveaux fabricants de projecteurs (Vari-Lite, Morpheus, High End Systems, Clay Paky, Martin, …) et avec eux les préfigurations des projecteurs asservis actuels.

Cette technologie bénéficie aujourd’hui de 40 années de R&D et d’expérience de la scène. Ses évolutions ont suivi celles des microprocesseurs, des processeurs de signaux numériques et des microcontrôleurs ; la plupart de ces appareils sont fiables et robustes et aujourd’hui équipés de LEDs. Certains sont conçus plus spécifiquement pour répondre aux exigences esthétiques du théâtre avec une attention particulière portée sur la qualité de la gradation, de la couleur et sur l’absence de bruit. Leur polyvalence permet de les utiliser dans toutes les situations et il est pertinent de s’interroger sur leur utilisation qui peut s’avérer précieuse lorsqu’il s’agit de gagner du temps, notamment en tournée (montage, réglage).

Exemple de projecteurs asservis