L’employeur

Florent Prévoteaux

Directeur technique du Centre Culturel André Malraux, scène nationale

Vandœuvre-lès-Nancy (54)

« Le Centre Culturel André Malraux est un ERP de type L (salles à usage d’auditions, de conférences, de réunions, de spectacles, ndlr), avec des activités de type N et Y, donc restaurants, débits de boisson et musée. C’est également un bâtiment de 3e catégorie qui peut donc recevoir entre 301 et 700 personnes. À l’ouverture du bâtiment qui a été rénové en 2007, la commission de sécurité a validé une jauge de 606 personnes au total.
La jauge est calculée par rapport au dégagement, un genre de couloir virtuel dans lequel on imagine une évacuation d’urgence du public. Pour une porte de 90 ou de 140 centimètres de largeur, il faut trois unités de passage qui équivalent à 1m80. En fonction de la largeur et du nombre de dégagements, on calcule l’effectif : trois personnes au mètre carré. Tout ça est régi par le code des ERP.

Tous les deux ans, la commission de sécurité passe pour vérifier la sécurité du bâtiment. Lorsqu’on est un ERP, il y a des vérifications obligatoires périodiques : l’élevage est vérifié deux fois par an, l’électricité une fois par an et la protection incendie, une fois par an.

Aujourd’hui mon métier a changé car les contraintes ont changé, que ce soit avec le terrorisme ou cette année, la Covid-19 qui a un sérieux impact sur nos jauges (le CCAM est désormais à 59% de son remplissage, ndlr) et sur la circulation des publics. Depuis quelques années, on acquiert des compétences sur ces questions sur lesquelles nous ne sommes pas formés. C’est le propre du spectacle vivant : on s’adapte constamment.

En plus de ces circonstances, nous veillons à ce que les salariés soient formés, notamment lorsqu’ils doivent travailler en hauteur ou effectuer des travaux électriques. Le travail au plateau requiert par ailleurs des compétences particulières. Nous organisons des formations en commun sur tout ce qui concerne les incendies.

S’agissant des artistes que nous recevons, ils sont salariés par les compagnies. C’est toujours l’employeur qui porte les responsabilités. On ne demandera jamais à un artiste de monter des lumières ou des artifices, en dehors de ça, la sécurité est la même que pour chacun de nos salariés. »

- 2020 -

Dans le Code du Travail, est habituellement désigné employeur, la personne morale qui emploie du personnel salarié. L’employeur et le salarié sont liés par un contrat de travail qui instaure un lien de subordination, un travail à réaliser contre une rémunération.

Une association culturelle employant des artistes et techniciens, un prestataire employant des ouvriers électriciens, une entreprise de gardiennage employant des agents de sécurité, etc. Les employeurs sont nombreux au sein des manifestations culturelles.

L’employeur dispose de divers pouvoirs, mais il a également de nombreuses obligations (sociale, sociétale, etc.), notamment dans le domaine de la sécurité.

L’obligation générale de sécurité

L’employeur est tenu à une obligation générale de sécurité et de moyens renforcés à l’égard de ses salariés. La responsabilité pénale et civile de l’employeur peut être engagée en cas de manquements aux obligations en matière de santé et de sécurité.

Les neuf principes généraux de prévention

Les différents outils pour la sécurité au travail

Pour satisfaire aux obligations en matière de santé et de sécurité au travail, l’employeur dispose de différents outils.

Le Document Unique d’Évaluation des Risques (DUER)

L’employeur transcrit et met à jour, dans un document unique, les résultats de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, pour chaque “unité de travail”, pour identifier, classer, hiérarchiser et prioriser l’ensemble des risques, pour fonder le programme des actions de prévention des risques. Cette obligation peut aussi être un important outil de prise de décision participative. (CODE DU TRAVAIL, R. 4121-1 et suivants)

La formation et l’information

Parmi les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, les actions d’information et de formation sont en bonne place.

La formation à la sécurité concourt à la prévention des risques professionnels. L’employeur informe les travailleurs, sur les risques pour leur santé et leur sécurité, d’une manière compréhensible pour chacun. Cette information ainsi que la formation à la sécurité sont dispensées lors de l’embauche et chaque fois que nécessaire.
(CODE DU TRAVAIL, L4121-1 et suivants et R 4141-1 et suivants)

Le plan de prévention

La co-activité de plusieurs entreprises sur un même site et l’interférence des équipes de travail pour l’organisation d’un spectacle, peuvent générer des risques particuliers.

Exemple : si un théâtre accueille une compagnie sur sa scène et fait appel à un prestataire de services pour la vidéo ; alors trois “entreprises” œuvrent toutes sur un même site. Le théâtre devra alors initier la démarche de plan de prévention des risques professionnels pour pallier les risques générés par la présence simultanée des trois entreprises.
(CODE DU TRAVAIL, R4512-12 et suivants)

Le protocole de sécurité pour les opérations de chargement et de déchargement

Le protocole de sécurité pour les opérations de chargement et de déchargement est la transposition de la démarche du plan de prévention dédiée à ces opérations. Ce protocole comprend les informations utiles à l’évaluation des risques de toute nature, générés par ces opérations, ainsi que les mesures de prévention et de sécurité à observer à chacune des phases de sa réalisation.
(CODE DU TRAVAIL, R4515-4 et suivants)

L’organisation des secours

Le Code du Travail oblige l’employeur à organiser dans son entreprise les soins d’urgence à donner aux salariés accidentés et aux malades. Cette organisation des secours passe par la mise en place, sur les lieux de travail, d’un dispositif d’alerte en cas d’accident ou de personne malade, la présence de sauveteurs secouristes du travail et la mise à disposition d’un matériel adapté de premiers secours.

La conduite à tenir en cas d’urgence doit être rédigée et consignée dans un document porté à la connaissance du personnel et facilement accessible. Ce document est également tenu à la disposition de l’inspecteur du travail. (CODE DU TRAVAIL, R. 4224-14 et suivants)

Le Code du Travail oblige aussi l’employeur à prendre les mesures nécessaires pour que tout début d’incendie puisse être rapidement et efficacement combattu dans l’intérêt du sauvetage des travailleurs.
(CODE DU TRAVAIL, R.4227-28)

L’organisation du temps de travail

La définition des horaires de travail, l’établissement des plannings, le respect des durées des phases de travail et de repos, permettent de limiter les risques liés à la fatigue du personnel. Sauf accord de branche, accord collectif, accord d’entreprise ou dérogation exceptionnelle, le Code du Travail prévoit un temps de travail maximum autorisé de :

• 10 heures par jour
• 6 jours par semaine
• 48 heures par semaine

Et un temps de repos minimum de :

• 11 heures consécutives quotidiennes
• 35 heures consécutives hebdomadaires (24h + 11h)

(CODE DU TRAVAIL, L3121-18 et suivants L3132-1 et 2)

Les équipements de protection

Dans le cadre de l’évaluation des risques, lorsque cela s’avère nécessaire, l’employeur doit mettre en place des équipements de protection. La sécurité doit être assurée en priorité au moyen de protections collectives (échafaudages de service, garde-corps, etc.) puis, dans le cas où la mise en place d’une protection collective n’est pas possible, au moyen de protections individuelles (harnais, casques, etc.).

L’employeur fourni gratuitement les Équipements de Protection Individuelle aux salariés concernés et doit les former à leurs utilisations.

La délégation de pouvoir

La responsabilité pénale de l’employeur est régie tant par le Code du Travail que par le Code Pénal. Il appartient au chef d’entreprise de veiller à la stricte application des prescriptions légales ou réglementaires destinées à assurer la sécurité des travailleurs.

Qu’il soit personnellement auteur de l’infraction ou que le manquement à la réglementation soit le fait d’un de ses salariés, la responsabilité pénale pèse donc uniquement sur l’employeur, sauf délégation de pouvoir à un préposé désigné par lui et pourvu de la compétence et de l’autorité nécessaires pour veiller efficacement à l’observation des règles en vigueur.

L’encadrement peut donc aussi voir sa responsabilité pénale engagée, du fait d’une délégation de pouvoir, dans la mesure où il sera prouvé que le délégataire avait la compétence, les moyens humains, matériels et financiers, ainsi que l’autorité pour assurer la délégation.

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